Pour mémoire les précédents :
ATELIER D'ECRITURE N°1
ATELIER D'ECRITURE N°2
Nous allons un peu sortir du milieu du poker pour cet atelier. (Nous y reviendrons au numéro 4).
L'exercice est le suivant :
Ecrire un texte donc le titre serait "mémoires d'une petite cuiller rangée"
--------------ATELIER D'ECRITURE N°3-----------------
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- brioitxavier
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Mémoires d’une petite cuillère rangée
Qu’ils sont tristes mes vieux jours ! Je suis toute recroquevillée, toute rouillée. Je ne vois plus que des aliments pour chats.
Mais cela n’a pas toujours été ainsi !
Je me souviens : je suis arrivée dans cette maison il y a vingt-cinq ans. J’étais accompagnée de cinq petites sœurs, de mes cousines les fourchettes et de mes cousins les couteaux. Nous nous appelions la famille « service de table ». Je reluisais. J’étais très enviée car j’étais la plus utilisée, la plus chouchoutée.
Je plongeais dans le café à peine levée. Le midi, après m’être amusée avec la salade de fruits, j’avais droit à un bon bain de mousse avec toute ma famille. Je me rappelle des fous rires avec une fourchette qui avait toujours des morceaux collés sur les dents, je me souviens d’un couteau qui avait l’air louche et d’une louche qui aimait mettre les pieds dans le plat. Mais ce que je préférais par dessus toute chose, c’était d’enfiler mon pyjama du soir : un voluptueux fromage blanc sur lit de miel.
Parfois, j’étais malade, alors on me donnait un peu de sirop. Je menais vraiment la belle vie.
Mais un jour tout changea. Après chaque usage, on me mit dans une grosse machine. Il y régnait un noir terrifiant. J’étais ballottée dans tous les sens. Cela s’appelait le « lave-vaisselle ». Terminé le temps des caresses avec le liquide vaisselle, terminé le temps des chatouilles avec les gants de caoutchouc, terminé le temps des discussions avec mon ami le torchon. En très peu de temps, toute notre famille « service de table » se mit à dépérir. Certains furent même « empoubellés » !
Moi, je n’ai pas eu cette chance et, aujourd’hui, j’aimerais les rejoindre. On ne prend même plus la peine de me ranger. Je traîne là, près de la gamelle du chat et je le regarde, ce Félix, en espérant qu’un jour il m’emmènera loin d’ici.
Qu’ils sont tristes mes vieux jours ! Je suis toute recroquevillée, toute rouillée. Je ne vois plus que des aliments pour chats.
Mais cela n’a pas toujours été ainsi !
Je me souviens : je suis arrivée dans cette maison il y a vingt-cinq ans. J’étais accompagnée de cinq petites sœurs, de mes cousines les fourchettes et de mes cousins les couteaux. Nous nous appelions la famille « service de table ». Je reluisais. J’étais très enviée car j’étais la plus utilisée, la plus chouchoutée.
Je plongeais dans le café à peine levée. Le midi, après m’être amusée avec la salade de fruits, j’avais droit à un bon bain de mousse avec toute ma famille. Je me rappelle des fous rires avec une fourchette qui avait toujours des morceaux collés sur les dents, je me souviens d’un couteau qui avait l’air louche et d’une louche qui aimait mettre les pieds dans le plat. Mais ce que je préférais par dessus toute chose, c’était d’enfiler mon pyjama du soir : un voluptueux fromage blanc sur lit de miel.
Parfois, j’étais malade, alors on me donnait un peu de sirop. Je menais vraiment la belle vie.
Mais un jour tout changea. Après chaque usage, on me mit dans une grosse machine. Il y régnait un noir terrifiant. J’étais ballottée dans tous les sens. Cela s’appelait le « lave-vaisselle ». Terminé le temps des caresses avec le liquide vaisselle, terminé le temps des chatouilles avec les gants de caoutchouc, terminé le temps des discussions avec mon ami le torchon. En très peu de temps, toute notre famille « service de table » se mit à dépérir. Certains furent même « empoubellés » !
Moi, je n’ai pas eu cette chance et, aujourd’hui, j’aimerais les rejoindre. On ne prend même plus la peine de me ranger. Je traîne là, près de la gamelle du chat et je le regarde, ce Félix, en espérant qu’un jour il m’emmènera loin d’ici.
Petite cuillère de fabrication étrangère, j’ai été expatriée en France dès mon plus jeune âge. Mes onze sœurs et moi étions soudées par ce lien étroit que l’on nomme d’ordinaire plastique. Je n’ai comme souvenir du début de mon existence que le brouhaha étouffé d’une foule omniprésente.
J’étais alors jeune et sulfureuse, piégée dans ce bac à visage découvert, je rêvais que l’on me kidnappe pour découvrir le monde. J’enviais les mouvements d’extase que suscitait cette élite présomptueuse et hautaine que formaient les verres en cristal. La soif d’aventure et le désir d’indépendance rendaient chaque jour plus oppressant le lien m’enserrant à mes sœurs.
A plusieurs reprises, j’eus l’espoir que mon rêve se réalise. Quelle ne fut pas ma déception lorsque j’entendis cette petite voix fluette aux mains délicates clamer à sa mère « mais maman, celle-ci est tâchée, prenons-en une autre ! ». Petit peste au regard d’ange !
Plongée dans les méandres du désespoir, je me résignais peu à peu lorsqu’un jour une force abrupte me souleva sans ménagement du bac de mon enfance. Une femme, dont la figure fade et blasée rendait absurde la notion même de bonheur, qui ne me regarda même pas.
Sombre amalgame que celui d’assimiler cet envol à une libération ! N’en résulta en effet qu’une oppression et une soumission plus fortes. Je passais le plus clair de mon temps dans un évier aux odeurs sans saveur. Ecrasée par une pile d’assiettes, je subissais leurs gloussements incessants. Soumises elles aussi aux maîtres tyranniques des lieux, elles croyaient bon de retrouver une illusion d’amour propre en manifestant une certaine supériorité à mon égard. Haineuses et superficielles, elles se sentaient flattées de m’entendre gémir.
Un jour, cependant, le fils de cette maisonnette sans âme partit. Il décida de nous emmener, quelques unes de mes congénères et moi-même. Il ne vivait pas seul, le couple était propre et ordonné. Je connus enfin ce que l’on peut, à mon sens, qualifier de bonheur. J’étais traitée avec délicatesse et respect, lavée et essuyée à chaque repas, je me sentais vivre ! Je n’oublierai jamais cette période de ma vie et ces instants de plénitude !
On eut cependant la bien sombre d’idée d’offrir à ce couple sympathique de la vaisselle plus récente. S’immisça alors dans ma vie cette armée de petites cuillères pimpantes et scintillantes. Ces petites starlettes dont la présomption et le narcissisme rendaient pathétiques toute intervention de leur part envahirent bientôt mon espace vital.
Il fallut alors me rendre à l’évidence. J’avais vieilli et le calcaire avait eu raison de moi, brimant mon éclat par ces tâches immuables. Bien que ma carrière semble aujourd’hui être à l’aube de sa fin, je coule des jours paisibles, me nourrissant des récits de ces jeunes naïves dont l’abrupte carapace cache en fait une sensibilité et une fragilité surprenantes. Leur soif de reconnaissance et leur angoisse existentielle les poussant à boire mes paroles sans modération, nous trouvons au final toutes notre dessein, chacune utile d'une quelconque façon.
J’étais alors jeune et sulfureuse, piégée dans ce bac à visage découvert, je rêvais que l’on me kidnappe pour découvrir le monde. J’enviais les mouvements d’extase que suscitait cette élite présomptueuse et hautaine que formaient les verres en cristal. La soif d’aventure et le désir d’indépendance rendaient chaque jour plus oppressant le lien m’enserrant à mes sœurs.
A plusieurs reprises, j’eus l’espoir que mon rêve se réalise. Quelle ne fut pas ma déception lorsque j’entendis cette petite voix fluette aux mains délicates clamer à sa mère « mais maman, celle-ci est tâchée, prenons-en une autre ! ». Petit peste au regard d’ange !
Plongée dans les méandres du désespoir, je me résignais peu à peu lorsqu’un jour une force abrupte me souleva sans ménagement du bac de mon enfance. Une femme, dont la figure fade et blasée rendait absurde la notion même de bonheur, qui ne me regarda même pas.
Sombre amalgame que celui d’assimiler cet envol à une libération ! N’en résulta en effet qu’une oppression et une soumission plus fortes. Je passais le plus clair de mon temps dans un évier aux odeurs sans saveur. Ecrasée par une pile d’assiettes, je subissais leurs gloussements incessants. Soumises elles aussi aux maîtres tyranniques des lieux, elles croyaient bon de retrouver une illusion d’amour propre en manifestant une certaine supériorité à mon égard. Haineuses et superficielles, elles se sentaient flattées de m’entendre gémir.
Un jour, cependant, le fils de cette maisonnette sans âme partit. Il décida de nous emmener, quelques unes de mes congénères et moi-même. Il ne vivait pas seul, le couple était propre et ordonné. Je connus enfin ce que l’on peut, à mon sens, qualifier de bonheur. J’étais traitée avec délicatesse et respect, lavée et essuyée à chaque repas, je me sentais vivre ! Je n’oublierai jamais cette période de ma vie et ces instants de plénitude !
On eut cependant la bien sombre d’idée d’offrir à ce couple sympathique de la vaisselle plus récente. S’immisça alors dans ma vie cette armée de petites cuillères pimpantes et scintillantes. Ces petites starlettes dont la présomption et le narcissisme rendaient pathétiques toute intervention de leur part envahirent bientôt mon espace vital.
Il fallut alors me rendre à l’évidence. J’avais vieilli et le calcaire avait eu raison de moi, brimant mon éclat par ces tâches immuables. Bien que ma carrière semble aujourd’hui être à l’aube de sa fin, je coule des jours paisibles, me nourrissant des récits de ces jeunes naïves dont l’abrupte carapace cache en fait une sensibilité et une fragilité surprenantes. Leur soif de reconnaissance et leur angoisse existentielle les poussant à boire mes paroles sans modération, nous trouvons au final toutes notre dessein, chacune utile d'une quelconque façon.
Dernière édition par zelyh le Mardi 15 Avril 2008 09:43, édité 1 fois.
Thaam a écrit :Espèce de croquette de poisson congelée !
- johan71
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zelyh a écrit :Petite cuillère de fabrication étrangère, j’ai été expatriée en France dès mon plus jeune âge. Mes onze sœurs et moi étions soudées par ce lien étroit que l’on nomme d’ordinaire plastique. Je n’ai comme souvenirs du début de mon existence que le brouhaha étouffé d’une foule omniprésente.
J’étais alors jeune et sulfureuse, piégée dans ce bac à visage découvert, je rêvais que l’on me kidnappe pour découvrir le monde. J’enviais les mouvements d’extase que suscitait cette élite présomptueuse et hautaine que formaient les verres en cristal. La soif d’aventure et le désir d’indépendance rendaient chaque jour plus oppressant le lien m’enserrant à mes sœurs.
A plusieurs reprises, j’eus l’espoir que mon rêve se réalise. Quelle ne fut pas ma déception lorsque j’entendis cette petite voix fluette aux mains délicates clamer à sa mère « mais maman, celle-ci est tâchée, prenons-en une autre ! ». Petit peste au regard d’ange !
Plongée dans les méandres du désespoir, je me résignais peu à peur lorsqu’un jour une force abrupte me souleva sans ménagement du bac de mon enfance. Une femme, dont la figure fade et blasée rendait absurde la notion même de bonheur, ne me regarda même pas.
Sombre amalgame que celui d’assimiler cet envol à une libération ! N’en résulta en effet qu’une oppression et une soumission plus fortes. Je passais le plus clair de mon temps dans un évier aux odeurs sans saveur. Ecrasée par une pile d’assiettes, je subissais leurs gloussements incessants. Soumises elles aussi aux maîtres tyranniques des lieux, elles croyaient bon de retrouver une illusion d’amour propre en manifestant une certaine supériorité à mon égard. Haineuses et superficielles, elles se sentaient flattées de m’entendre gémir.
Un jour, cependant, le fils de cette maisonnette sans âme parti. Il décida de nous emmener, quelques unes de mes congénères et moi-même. Il ne vivait pas seul, le couple était propre et ordonné. Je connus enfin ce que l’on peut, à mon sens, qualifier de bonheur. J’étais traitée avec délicatesse et respect, lavée et essuyée à chaque repas, je me sentais vivre ! Je n’oublierai jamais cette période de ma vie et ces instants de plénitude !
On eut cependant la bien sombre d’idée d’offrir à ce couple sympathique de la vaisselle plus récente. S’immisça alors dans ma vie cette armée de petites cuillères pimpantes et scintillantes. Ces petites starlettes dont la présomption et le narcissisme rendaient pathétiques toute intervention de leur part envahirent bientôt mon espace vital.
Il fallut alors me rendre à l’évidence. J’avais vieilli et le calcaire avait eu raison de moi, brimant mon éclat par ces tâches immuables. Bien que ma carrière semble aujourd’hui être à l’aube de sa fin, je coule des jours paisibles, me nourrissant des récits de ces jeunes naïves dont l’abrupte carapace cache en fait une sensibilité et une fragilité surprenantes. Leur soif de reconnaissance et leur angoisse existentielle les poussant à boire mes paroles sans modération, nous trouvons au final toutes notre dessein, chacune utile d'une quelconque façon.
Tu parle de Shoot Mel
Trés sympa ta vision de cette petite cuillère
Il faudrait essayer d'être heureux, ne serait-ce que pour donner l'exemple.
Johan 3- Mars13 0 (2013)
Joueur « spécial » tricky à tendance passive. Comble ses lacunes en technique par des bonnes lectures. Joueur Old school.
Johan 3- Mars13 0 (2013)
Joueur « spécial » tricky à tendance passive. Comble ses lacunes en technique par des bonnes lectures. Joueur Old school.
- shootagain
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